Nous sommes au début du 13ème siècle. La dévotion mariale est établie dans toute la ville et la Provence, poussée par les ordres religieux dont celui de Saint Benoît.
C’est alors que Pierre Oblat, prêtre de la paroisse des Accoules a l’irrésistible envie de créer un lieu de dévotion uniquement réservé à la Sainte Vierge Marie. Quel endroit mieux choisi que la colline de la Garde ? Du haut de ses 150 m, elle domine l’ensemble de la ville, mais aussi tous les terrains environnants (ce qui sera de nos jours la ville de Marseille). Le terrain appartient à l’abbaye de Saint Victor. Il demande donc à l’abbé l'autorisation de faire construire une petite église. Saint Victor est le berceau de l’amour marial à Marseille et il obtient rapidement les faveurs de l’abbaye.
Voici ci-dessous la traduction de l’acte de la concession de St Victor charte 1028 année 1214 « De la Garde, « L'an de l'Incarnation du Seigneur 1214. Au nom de Dieu que tous présents et à venir sachent que nous G(uillaume), par la miséricorde divine abbé de Marseille, par le conseil et la volonté de tout notre couvent, nous te donnons et te concédons à toi, maître P(Pierre), la colline qui domine notre monastère, appelée la Garde, afin que tu y édifies une église ainsi que les bâtiments nécessaires à toi et à cette église et que tu puisses y faire un jardin, ou une vigne ou tout autre culture qu'il te sera possible, et cela à la condition que tu posséderas, tiendras et gouverneras ce lieu tant que tu demeureras obéissant et fidèle à nous et à nos successeurs, sans en pouvoir rien aliéner sans notre autorisation et notre consentement ou ceux de nos successeurs. A cet effet, tu verseras chaque année en la fête de saint Victor 12 deniers royaux couronnés en guise de cens à notre cellerier. En outre, ce lieu, avec toutes les améliorations et adjonctions que tu lui auras apportées, reviendra sans obstacles sous le pouvoir et la juridiction de notre monastère à ton décès. Et moi P(Pierre) susnommé, acceptant la concession dudit lieu volontiers et de ma propre volonté, pour l'amour de Dieu et le salut de mon âme, je me donne au Seigneur Dieu et au monastère de Marseille comme frère, fidèle et fils, entre vos mains, seigneur G(uillaume), abbé de Marseille, et je me lie au monastère en prononçant le vœu de ne pas me permettre d'entreprendre un voyage sans permission de l'abbaye ni de changer de résidence pour prendre l'habit d'un autre ordre. Je promets donc par serment sur les saints Evangiles à vous et à vos successeurs pour toujours la fidélité, le respect et l'obéissance ainsi que, l'observation fidèle de ce qui est énuméré plus haut, sous cette condition toutefois que, du fait de ce serment, je ne sois point coupable, si omettant quelqu'une des choses promises plus haut et en étant averti deux ou trois fois par votre envoyé ou par lettre selon votre bon plaisir, je corrige ma faute en vous donnant satisfaction et je la répare par l'exécution de l'œuvre omise ». Traduction par B Guérard, Le petit cartulaire de Saint Victor 1857. t II p 488. | ![]() Acte de concession : Archives départementales, fonds 1H630, folio 181V. Petit cartulaire de St Victor |

Maître Pierre. Vue d'artiste.
L'abbé se met au travail, et l'église est rapidemant érigée. La dévotion populaire ne tarda pas à se manifester et Pierre demeura sans doute à son poste jusqu'à sa mort. Nous savons qu'en 1256, Aribert de Vézenobres lui succède, par nomination du prieur de Saint Victor.
Puis Notre Dame de la Garde est constituée en prieuré, dont le prieur devient prieur de Saint Victor et célèbre le saint sacrifice tous les matins à la chapelle de la Garde. Très vite il devient un personnage important. Les dons affluent. La liste connue des donnations et testaments remonte au XIII ème siècle. L'acte le plus ancien est daté du 25 juin 1243. C'est celui de Gilbert de Baux, grande famille de Provence. Il lègue une somme de 20 sols à l'église. On monte à Notre Dame de la Garde avant de partir en mer ou en pélérinage à Saint Jacques de Compostelle. Et on offre à la vierge des nappes brodées, des anneaux d'or, des cierges etc... Aux 14ème, 15ème et 16ème siècles les dons ou legs sont beaucoup plus conséquents et les ex-votos sont déja présents.
Le pape Honorius III, dans une bulle du 18 juin 1218 qui énumère les possessions de Saint Victor, cite l'église de Notre Dame de la Garde (ecclesia Sancte Marie de Guardia). Les travaux de construction ont donc été promptement menés malgré les difficultés d'acheminement des différents matériaux au sommet de la colline. Malheureusement nous ne savons que peu de choses de ce premier édifice. Nous n'avons ni dessin ou croquis, ni même une quelconque description.